C'est merveilleux - texte intégral - 1999 - Arnold Pasquier
À Marseille, cinq femmes architectes construisent un théâtre provisoire au bord de la mer. À Roubaix, cinq jardiniers créent un jardin public sur l’emplacement d’une friche industrielle.
Spectacle présenté dans la Grande Nef du Fresnoy, les 19, 20 et 21 novembre 1999.
  
Eva
Those lookses whose beames be joy, whose motion is delight,
That face whose lecture shewes what perfect beautie is,
That presence which doth give darke hearts a living light,
That grace which Venus weepes that she her selfe doth misse,

That hand which without touch holds more then Atlas might,
Those lips which make deaths pay a meane price for a kisse,
That skin whose passe-praise hue scorns this poore terme of white,
Those words which do sublime the quintessence of blisse,
 
That voyce which makes the soule plant himselfe in the eares,
That conversation sweet where such high comforts be
As consterd in true speech, the name of heav'n it beares :
 
Makes me in my best thoughts and quiest judgment see
That in no more but these I might be fully blest :
Yet ah my Mayd'n Muse doth blush to tell the best.
 
Fred
C’est un secret.
 
Vincent
J’ai une image immense, plus dense qu’une odeur de chèvrefeuille exprimée jusqu’à l’aube, plus lointaine et fondue que ne le serait, par exemple, le mouvement d’un nuage…
 
Christophe
Nous devons réfléchir à une commande des entreprises Lessaffre, fabricants textiles, à qui appartient le terrain. Ils cherchent à transformer cette friche industrielle en jardin public. Une lainière occupait le terrain, fermée au début des années 80. Ce projet privé intègre le grand plan de revalorisation du canal, commencé il y a dix ans.
J’attire votre attention sur le fait que nous devons travailler à un jardin temporaire, éphémère, car une voie rapide doit relier Roubaix à Wattreloo et scinde la parcelle en deux, à l’horizon 2004, 2005.

Vincent
J’entre. J’ai fait un vœu. Je voudrais entendre cette musique que j’entends dans l'instant du croisé des yeux si je croise tes yeux.
J’empote les feuilles et les fleurs, comble mon manque.
Je vérifie des sentiers. Je chemine avec toi. J’emporte, redis, observe.
OU le trouverai-je mon EDEN inventé à la mesure d’une
MAIN, traversée d’eaux couleur d’un œil qui me regarde la nuit ? Corps CONSIDERABLE déplié, bras ouverts, VIENS !
Que VIENNE le ruisselet qui m’entraîne !
Un bois d’olivier que je connais en dessous de Delphes, un champ de labour près d’Étampes, une route qui descend de Recanati sont les PREUVES de ce qui m’attend.
Ai-je choisi le bon OUTIL ?
Est-ce que je vais trouver, en bêchant, sarclant, ramassant menu les feuilles jaunies d’un Bouillon Blanc, ce que je cherche ?
Ou celle qui m’attend ?
 
Judith
Ce sentier nous mène, légers, à flanc de colline que domine un petit fortin. Dans la lumière du jour conclu, dans la montée tourbillonnante des parfums d’aubépine, de cade et de camomille qui éternisent ma joie, une montée bleue de romarin m’enivre. Je me tiens à ta chemise pour retenir cet élan qui m’emporte — quoi ? — une saisissante extase. Le picotement des herbes grasses, une bourrasque qui vient de la crique en bas me courbe la tête et m’emmitoufle et me lâche et me reprend, me fait lourde et légère un instant, captive et sans poids. Je suis toute accordée silencieusement au développement de la nuit qui dégringole dans le soulèvement extravagant du remous de la mer et des plantes une dernière fois béantes sous la nue, qui s’aveugleront pour encore demain — je serai absente — re-bruire et re-picoter — les frondaisons mordorées et les vagues — elles reparfumeront le sentier pour d’autres échappées et regards confondus, embués de larmes ? — moi, je pleure de contentement, de ma joie nouvelle, tantôt oubliée, de cette expérience comme un bain dans la mer, par haltes successives de pierres incultes, d’herbes folâtres, de bleus méconnaissables…
 
Gurvan
Mon sentiment de paysage remonte au souvenir d'une tranche de pain mangée sur la colline.
Je mange en famille l’œuf dur, les yeux vers la mer.
Mon père, avec son Rollei, fait peu de photographies de nous. Ce sont surtout des vues de paysages, d’architectures. Mais il y a une exception, le pique-nique !
Il nous photographie au déjeuner, qui, par la grâce de nos bivouacs, n’est pas un arrêt de la promenade que sont nos voyages, mais son centre.
La nappe, c’est le monde.
Les accessoires : un sac, la baguette de pain, l’eau, les tomates, les poires…
Une assiette en plastique.
Mon père cherche l’endroit longtemps, souvent il s’impose. C'est une crique, un panorama de collines, un promontoire qui est une scène inverse, le spectacle, c’est la vallée, dont la beauté joue des coudes avec le pâté de foie de canard. Je suis venu au paysage en mangeant.
Trouver l'endroit n'est pas simple.
Mon père prend des chemins peu carrossables, des chemins de noisetiers.
Parfois, au cul-de-sac, nous rebroussons chemin et l’attente du déjeuner, précipitée par la faim, donne à notre recherche inquiète un air de quête éperdue.
Je vais de mes mains — elles portent à ma bouche le sandwich — aux ciels, aux étendues vertes, aux promesses que me fait ce rocher qui soustrait un monde que je vais voir.
Car je pars en excursion, le temps de mon œuf dur. Là-bas, de l’autre côté de l’appel, il y a les roches rouges de la presqu’île de Giens. Par-dessus la tête de mon frère qui en est au fromage, je mesure l’horizon sur la mer à Monaco-Beausoleil dans une brume mauve.
 
Eva
Il y a trop de bruit, trop de vent ; la mer, c’est beau, c’est surtout bruyant. Il n’y a pas d’ombre. Il y a des pierres et la mer.
 
Guilaine
C’est vrai que je rêvais d’un chemin qui descendrait vers une crique rouge avec cette impression que l’on ne va pas au théâtre mais…
 
Eva
Au lieu de quoi c’est la lune qui tombe dans l’eau.
 
Guilaine
Ah ! La lune qui tombe dans l’Eau ! Mais je veux la merveille, un caillou dans la main, pas une ombre mais celle que je fais, longue, le soir ! Presque rien, si ce n’est cette masse compacte de blancheur qu’il faut couper, tailler, sculpter ! Puisqu’on nous le demande !
 
Eva
Comment tu t’arranges de la déclivité du terrain qui tombe dans la mer ? Du bloc sonore de la mer qui est une folie pour un théâtre…
 
Judith
Une roche calcaire, blanche, très friable. Avec une végétation basse, de buissons, de fleurs grasses, il n’y a pas de terre, c’est raviné par les pluies. Un creux entre deux montagnes, un ravin. Un ouvrage d’art spectaculaire barre la descente. C’est un tunnel en appareil de pierres blanches qui ressemble à un barrage. La largeur de la plate-forme est de dix mètres… Il y a deux voies de chemin de fer à l’intérieur. Rien ne laisse à penser qu’un train passe dans le caisson de pierre, c’est la ligne Marseille-Carry-le-Rouet. Le dernier train circule en fin d’après-midi. L’ensemble fait soixante mètres de longueur, donc d’ouverture de plateau. Et dix mètres de hauteur, entre le bas de la vallée et le plateau. La surface du toit du tunnel se prête à un aménagement. Une route qui vient du village de Rove atteint une ancienne construction fortifiée, dont il ne reste que l’enceinte. Cette citadelle pourrait intégrer la billetterie, l’administration du théâtre. Elle surplombe la baie. C’est le point de départ de la descente vers la mer. Actuellement c’est dangereux, juste un chemin de chèvre, rien de stable. Il faut penser à une voie praticable qui descende jusqu’aux gradins.
 
Sylvain
Pror ai del chan essenhadors
Entorm mi et ensenhairitz :
Pratz e vergiers, albres e flors,
Voutas d’auzelhs e lays e critz,
Per lo dous termini suau,
Qu’en un petit de joy m’estau,
Don nulhs deportz no·m pot jauzir
Tan cum solatz d’amor valen.
 
Marika
La lumière tombe comme un feu rapide, elle embrase l'im­meuble, fouille l'arbre sur le quai, révèle la place. Je descends vers le fleuve. Le Gange est la formule qui m’ouvre au paysage. Je com­mence ici mon récit, nommé par la lumière, d'un coup d’éclat tout est vivant, les ressorts secrets affleurent.
Je suis en Inde, à Bénarès, assise sur un môle octogonal attaché à la rive d'une volée de marches encombrées. Sous mes pieds, dans un temple fiché en contrebas des marches, dédié au fleuve, un brahmane déplace ses mains, paumes ouvertes devant le rivage, les yeux mis clos, absorbé de prières depuis l'aube. Un parasol de bambou à la couverture tressée de palmes jaunies est planté dans une brèche du sol de grès. L'eau est rose, le soleil se couche. Le fleuve s'étale immense et de l'autre côté, la rive sablon­neuse est orangée, lisérée d'un ruban vert de forêt. Des lampes à huile sont allumées. Je devine des bateliers qui s'assoient pour une dernière tasse de thé. Un petit kiosque de planches fait office de guinguette. Il n'y a pas de vent, la rumeur décline.
 
Gurvan
Qu’est-ce que tu veux changer ? C’est un jardin dessiné, avec ses allées, ses circulations, ses territoires.
 
Christophe
Ça me fait peur.
 
Gurvan
Peur de quoi ?
 
Christophe
Pour un enfant, ces taillis impossibles à franchir, ces ronces, les orties. Tu ne sais même pas ce qu’il y a derrière les fourrés ! Des trous ! Des blocs de ciment baignant dans un jus de fer rouillé.
 
Gurvan
Il n’y a rien de plus attrayant qu’un roncier qui cache quelque chose. Qui promet en dessous. Pour un enfant dont le regard ne dépasse pas la frondaison d’un taillis, il n’y a rien de tel qu’une belle pelouse pour mourir d’ennui.
 
Christophe
Jouer dans les ronces… Tu les contrains à marcher en file indienne et à tourner en rond !
 
Gurvan
Ce sont EUX qui ont modelé les chemins et les clairières de cette friche. Enfin, c’est un compromis entre le développement de la végétation et la fréquentation. S’ils avaient eu besoin de plus d’espace, ils auraient pu façonner le paysage, par d’autres marches, des coupes. Je suis d’accord que ce qui existe est plus le fait de la nature, elle-même contrainte par le terrain, la nature du sol, que le résultat d’un projet de jardin, mais tu ne peux pas négliger l’usage. Nous n’avons pas idée des délices de ce jardin.
 
Christophe
Il n’y a que de la mauvaise herbe…
 
Gurvan
Tout est possible, puisque rien n’est arrêté.
 
Christophe
Je n’ai pas d’émotions. Un jardin à ce point sans dessein… Pas écrit pour moi, pas de chemin, pas de sentiers réfléchis qui me donnent à penser, à comprendre près de moi la présence de cette femme qui marche à mes côtés, oui, parce qu’une certaine lumière invitée me l’indique, en silence. Au lieu de quoi, je suis dans le roncier, la grande ortie. Il ne me reste que la marche, l’avancée rapide pour saisir ce jardin, quelque part, que j’attends, cette promesse que me font les jardins silencieusement ! Et bien non, je suis sans repère, sans carte, perdu, boussole cassée, au centre de cette friche sans géographie.
 
Guilaine
Je fais de l’architecture pour être avec les gens. Je ne sais pas si l’on peut formuler précisément les raisons qui nous engagent, comment on y va, pourquoi… Mais le premier mot, si on me demande, c’est d’être ensemble. Pas seulement pour être sur le chantier, où à l’agence, c’est même singulièrement solitaire comme désir de groupe. Si je pense à ce projet de théâtre, je pense à la multitude, à la masse noire des hommes et des femmes qui entrent, s’installent, regardent, s’en retournent chez eux. Et, au milieu de ces visages sombres, de cette houle, il y a le visage d’un homme qui me regarde. Non, ne souris pas, vraiment ! C’est toujours le même et il change à chaque fois, de regard. Je crois bien qu’il me dit quelque chose. Par exemple, une chose toute bête : “ La dernière fois, pour ton bar à Aix-en-Provence, j’ai eu un mal fou à m’asseoir au comptoir, je ne savais pas où ranger mes jambes ! ”. Bon, je me dis, au théâtre, même pour une très belle pièce, il faut être bien assis. Ce qui est tolérable au café — tu vas aux toilettes, tu tournes à droite, tu regardes vers la porte — ça devient pénible au théâtre… Alors il est là, on discute !
 
Judith
C’est l’homme de ta vie ?
 
Guilaine
Je crois bien, oui…
 
Judith
Tu l’as rencontré ?
 
Guilaine
Non ! Je te dis qu’il change de visage. Il accompagne ma fantaisie. C’est un reflet de ces visages heurtés en dormant et qui sont précisément un indice de bonheur, ces corps dont il ne te reste, au réveil, qu’une douce idée. C’est un peu de lui et de lui et un autre encore… Mais c’est pour LUI que je travaille.
 
Eva
Ça fait un peu curé.
 
Guilaine
Moi ?
 
Eva
Et admettons que tu le rencontres…
 
Guilaine
Mais non, c’est un reflet…
 
Eva
Tu me rappelles ce poète médiéval dont il faut que je vous raconte la légende, qui écrit de belles et bonnes chansons pour une femme lointaine dont il ne sait rien sauf qu’il l’aime, qu’il l’aime pour ce que d’autres en disent et qui l’ont vue, ou peut-être vue, l’amante lointaine.
 “ Voici le conte : Jaufré Rudel de Blaye était un homme de haute noblesse, et prince de Blaye. Il s’éprit de la comtesse de Tripoli, sans la voir, pour le bien qu’il en entendit dire aux pèlerins retour d’Antioche. Et il fit à son sujet maintes et bonnes chansons, belles mélodies, de mots modestes. Et par vœu de la voir, il se croisa et se mit en mer.
Il tomba malade sur la nef et fut conduit à Tripoli, en une auberge, tenu pour mort. Et à la comtesse on le fit dire : alors elle vint à lui, près de son lit, et le prit dans ses bras. Alors il sut que c’était la comtesse et derechef recobret l’auzir, e˙l flairar, recouvra l’ouïe et l’odorat ; et il loua Dieu, le remercia de ce qu’il l’avait maintenu en vie jusqu’à ce qu’il la vît. Et ainsi mourut dans ses bras et elle le fit ensevelir en grand honneur dans la maison du Temple. Et puis en ce jour se fit nonne, par douleur de sa mort. ”.
 
Guilaine
Je suis de passage à Bologna et un soir, nous allons en discothèque à Riccione, sur la côte Adriatique.
Le matin, après avoir dansé toute la nuit — je me rappelle le lever du soleil devant l’entrée de la discothèque, les vallons bleutés, une joie — nous réalisons que l’amie qui a la voiture est partie sans nous, sans nous retrouver, sans nous attendre ; nous sommes là, Simona et moi, c’est l’aube. Quelqu’un nous conduit à la gare et nous attendons un train pour retourner à Bologna. Nous nous trompons de train, nous le prenons en sens inverse vers Ancona. Après trois arrêts, nous descendons à Senigallia. C’est une petite ville balnéaire. Il est six heures et demie, nous nous renseignons : un omnibus par pour Bologna vers neuf heures. Simona est cuite, je la laisse dormir dans la salle d’attente et je lui promets de venir la réveiller.
Je sors de la gare, je suis profondément heureuse et libre.
La lumière sur l’esplanade, la chaleur qui monte.
Je traverse la route, je ne sens pas la mer, derrière moi, je l’ai vue par la fenêtre du train. C’est ce qui nous a averti de notre erreur, la mer était du mauvais côté.
Face à la gare, il y a une petite forteresse, la Rocca ; je traverse le jardin qui la borde. J’arrive sur une place rectangulaire, bordée de maisons de pierre couleur sable. Je m'engage dans la rue qui se présente face à moi. Je croise une rue plus grande, la rue principale, bordée de cafés, de magasins.
Je prends à droite, j’arrive à une rivière qui descend vers la mer, bordée d’un beau bâtiment en arcades. Je longe la rivière et sur ma droite, il y a un marché.
Ce n’est pas un jour de marché, la place est déserte, silencieuse, sans cesse visitée par une vague de pigeons qui s’envolent et retombent.
Il y a un bâtiment central, rectangulaire, qui s’ouvre sur la place par une grande colonnade et bordé, à gauche et à droite, par deux ailes en arc de cercle, qui s’ouvrent, elles aussi, par des piliers. La place centrale, de forme arrondie accueille les étals du marché, les deux ailes abritent des petites boutiques, toutes fermées ce matin, et le bâtiment central, c’est le marché aux poissons. Une grande hauteur sous plafond, de larges tables de pierre qui penchent.
Il est sept heures, je suis seule, j’ai croisé quelques hommes sombres qui coupent le paysage, je suis très éveillée, consciente. Je découvre un théâtre. Les deux ailes sont des rampes qui m’embrassent, la halle aux poissons, une scène, la place, une arène. Dans la lumière du matin, c’est dimanche, un café vient d’ouvrir à deux pas, je prends un espresso en ne quittant pas des yeux la place, je sais que je veux rendre compte de cela, fabriquer le sentiment que je ressens. Montrer de l’amour. Faire de l’amour.
 
Donata
A Ventimiglia, après un pont sur la route de Sanremo, je tourne à gauche et rentre dans la vallée. En contrebas, une rivière, la Nervia, est un puits noir où le jour finit. Je passe Camporoso, Isolabona. Je remonte la vallée, les grandes serres de pépiniéristes à flanc de colline se font plus rares, puis, à droite, c’est Apricale.
C’est maintenant la nuit. La ville accueille chaque été un spectacle de rue. Le spectacle s'arrange de lieux incongrus ; des caves, des croisements de chemins, des promontoires, des fenêtres sont le théâtre de scènes qui ponctuent un parcours dans la ville.
Cette année, le rêve et la fantasmagorie sont le thème du spectacle. “ Un sentiero di sogni ”, “ Un sentier de rêves ”. Je vois une femme étendue devant la mangeoire d’un cheval écumant, un poète déclame sous un réverbère… J’oublie un petit chapiteau de cirque qui est le départ du spectacle. Sur cette même place, domine le Palais communal. Le bâtiment est coiffé d’une toiture en terrasse. E il café delle stelle. Un parterre de plantes vert olive. Des allées divisées de rosiers grimpants fixés à des armatures métalliques en forme de portique. Un muret clôture la terrasse, une buvette est aménagée sous un auvent, il y a quelques tables et quelques chaises. Des guirlandes de petites ampoules jaunes frémissent d’un portique à l’autre. L’air est doux, je bois un verre de brachetto assise sur le muret. J’attends.
 
Vincent
C’est une belle promenade à Bologne, le portique de San Luca. A Bologne, les trottoirs sont protégés par des galeries ouvertes sur la rue. La ville est parcourue de ces artères scandées de colonnes. Il y en a une particulièrement que je connais, qui sort de la ville. C’est la première étape d’un chemin de croix. Le portique de San Luca. Il gravit, à flanc de colline, le Monte della Guardia qui rejoint la basilique. Il faut voir ce cheminement alterné de crépis jaunes splendides et de rouge profond. Il faut se représenter ces longs couloirs rectilignes, ces volées d’escaliers, ces fuites vertigineuses en avant qui font un coude à gauche et qui montent encore une fois et qui changent.
Si je suis sincère, je vous dis que j’attends une femme. Il me faut croiser dans ce lieu, à couvert, une femme qui descend vers moi. Je l’aperçois là-haut, silhouette d’abord, opacité qui se précise, se dessine dans l’interstice des bras, l’ouverture des jambes qui battent ; un éclair orange. J’entrevois à la démarche ce qui me retient, ce qui me concerne. Elle est là, devant moi, jamais si proche ! Nous n’avons pas changé d’allure ! Est-ce qu’elle sait que je l’attends, que je la vois venir depuis que je suis là ? Que je suis là exactement pour elle maintenant ! Mais elle passe, me traverse, m’accorde définitivement un regard déchargé !… Nous sommes seuls, elle est passée, elle s'écoule en arrière de moi. J’ai eu le temps, instantanément, d’inventer une vie avec elle, de la vivre en brûlant et d’y renoncer. Je compte les marches qui me séparent de l’abandon, de notre dénouement.
 
Donata
Il est là, devant moi, jamais si proche ! Nous n’avons pas changé d’allure ! Est-ce qu’il sait que je l’attends, que je le vois venir depuis que je suis là ? Que je suis là exactement pour lui maintenant ! Mais il passe, me traverse, m’accorde définitivement un regard déchargé !… Nous sommes seuls, il est passé, il s'écoule en arrière de moi. J’ai eu le temps, instantanément, d’inventer une vie avec lui, de la vivre en brûlant et d’y renoncer. Je compte les marches qui me séparent de l’abandon, de notre dénouement.
 
Eva
De désir mon cœur ne cesse
D’aller vers celle que j’aime le plus
Et la vouloir me rend fou
Si l’on veut me la prendre
Car elle est plus poignante qu’épine
La douleur que guérit la joie
Alors que nul ne m’en plaigne !
 
Guilaine
Un rideau de boules de plastique.
L’entrée d'une pâtis­serie, un matin, vers sept heures.
Un scintillement.
La masse sombre du corps de Luca qui mange un gâteau.
Un chapeau de paille en­touré de roses synthétiques.
Un pot de Nutella que je mange à la pe­tite cuillère.
— Fa la dieta ?
Le regard de Luca alors que je monte me coucher sans lui demander de me faire l'amour.
C’est une soirée dans la maison de Maurizio à Recanati.
Je suis là pour les va­cances dans cette cité sur la col­line, célèbre parce qu'elle a vu naître et mourir Leopardi, poète que j'ai découvert dans cette ville, d'ailleurs.
Maurizio effon­dré m'insulte : “ Analfabeta ! LEOPARDI ?! ” Renseignements pris, personne n’a entendu parler d’Arthur Rimbaud, comme quoi… Bon.
Donc, une fête. Dans le salon, je circule avec un chapeau de paille sur la tête et mon premier souvenir de Luca, c'est sur le canapé, il doit dire que je suis belle, que j'ai un beau visage… Je m'en souviens parce que je suis surprise et non parce que cela confirme quelque chose. Voilà. La nuit à parler. Je sens bien qu'il y a quelque chose, mais qu'est ce que je connais des hommes, moi ? Je ne sais pas comment, à l'aube, on se retrouve dans la même chambre, lui, presque nu sous les draps, en train de se cares­ser et moi, assise sur le rebord du lit, PA-RA-LI-SEE ! la gorge sèche, cher­chant à répondre à des questions qu'il me pose… Pour dire quoi, vraiment pour dire…
Maurizio ouvre grand la porte pour nous informer qu'il ne peut pas dormir et qu'il nous emmènerait bien boire un café sur la place !
Sur la place, le jour est là, pas encore. Je suis devant l'étalage des pâtisseries à choisir mon petit-déjeuner et je vois l'ombre de Luca derrière un rideau de perles de plastique miroitantes et là, je tombe amoureuse, à cet instant, c'est définitif.
Nous rentrons à la maison, nous sommes dans le salon, je monte me cou­cher, je regarde Luca assis dans un fauteuil, il ne com­prend pas que je l'invite, je le regarde en souriant pour lui dire de venir avec moi, viens dans mes bras, montre-moi ce que tu me pro­mets, je veux goûter…
Il ne le comprend pas, je le devine à son ex­pression de décep­tion, je le vois, mais je ne suis pas capable d'en faire plus, c'est nouveau.
Je rentre dans le lit, je l'attends, je m'endors, au ré­veil, il n'est plus là, il re­viendra, mais ce sera fini entre nous, je suis tombée amoureuse et c'est trop tard.
 
Christophe
Je n’y arrive pas. Je ne vois pas ce que je pourrais faire. A part peut-être boire toute l’eau du canal !
 
Gurvan
Ça ne servira pas.
 
Christophe
Que tu dis ! J’y vais tous les jours, j’use mes semelles de vent aux graviers, aux décombres, aux mauvaises herbes et je ne vois RIEN !
 
Gurvan
Tu as remarqué le talus à gauche de l’entrée, comme un plateau, recouvert de graminées, et une clairière ?
 
Christophe
J’ai surtout repéré les seringues…
 
Gurvan
Moi, je vais dans le pâturin…
 
Christophe
C’est de la crételle.
 
Gurvan
Je m’allonge, je regarde la forme des nuages et j’arpente.
 
Christophe
Bienheureux !
 
Gurvan
Je m’ouvre à tout vent. Je fais ce que je n’ose jamais, je danse nu, en Apache, autour d’une pousse de frêne. Je vadrouille, je moissonne des feuilles et des branches que je colle dans un grand cahier.
 
Christophe
On peut voir ?
 
Gurvan
Tout à l’heure.
 
Christophe
Herboriste égoïste…
 
Gurvan
Je sillonne la campagne et compare les panoramas.
Je plonge les mains dans les flaques, les mares. Je prête l'oreille à des retenues d’eau enfermées dans un sac. Je mesure les arbrisseaux, flaire les racines, hume les jus et m’accroche les grappes de fruits noirs et rouges aux oreilles.
 
Christophe
Saltimbanque ! Si tu me dis que tu parles aux oiseaux, je ne te croirai pas.
 
Gurvan
Non, mais je négocie avec un chat que je dérange sous l’acacia et surtout, je me cause, je n’arrête pas de me causer, de me raconter des histoires, d’en faire tout un feuilleton !
 
Marika
Je suis assise contre le muret de marbre blanc du mausolée du Taj Mahal.
Chaque instant de la nuit qui tombe immobilise une nuance lumineuse.
Je suis inscrite chaque seconde un peu plus à cet endroit.
Tu es là, à quelques mètres.
Chacun de mes regards vers le ciel passe d'abord par toi.
Tu ne sais pas comme ton corps contre le muret, ton visage dans ce paysage me donne envie d’inventer, d’entreprendre, de construire.
Ton corps me touche.
J'exulte parce que tu es là.
Je te regarde à la dérobée, tu tournes ton visage vers moi et de ma stupéfaction de folle amoureuse, tu souris…
Un sourire aussi m'échappe, timide. Je te souris inquiète, tu me donnes un sourire, tu m’as souri, tu me regardes.
Je ne sais plus te regarder.
Je sors du jardin que ta présence recompose et redit à chaque pas. Il fait nuit.
La fontaine étale, la circulation des Indiennes lasses dans la chaleur du soir, le claquement léger de leurs sandales et le froissement des cotonnades emperlées des saris, tout cela dans la musique des moindres bruissements de cette étendue de paysage, nous sommes en route vers la perte sûre de nos corps donnés dans ce sourire croisé.
Je te perds, je le sais.
Je suis amoureuse.
Comment le dire…
Cette lumière sur ta chemise bleue, l'arrondi de ton dos, ta tête penchée, ce sourire.
Je ne te connais pas.
Je ne te verrai plus.
Une splendeur que j'emmène me parle de ton visage d'éternité d'amour que je cherche.
 
Eva
Chagrin et gai, je me séparerai d’elle
Si je le vois cet amour de loin
Mais quand le verrai-je ?
Car nos terres sont trop lointaines
D’ici à là-bas tant de passes et de chemins
Et pour cela je ne suis pas devin
A dieu ne plaise !
 
Sylvain
Iratz e gauzens m’en partray,
S’ieu je la vey, l’amor de lonh :
Mas non sai quoras la veyrai,
Car trop son nostras terras lonh :
Assatz hi a pas e camis,
E par aisso no·n suy devis…
Mas tot sia cum a Dieu platz !
 
Ja mais d’amor no·m jauziray
Si no·m jau d’est’amor de lonh,
Que gensor ni melhor no·n sai
Ves nulha part, ni pres ni lonh ;
Tant es sos pres verais e fis
Que lay el reng dels Sarrazis
Fos hieu per lieys chaitius clamatz !
 
Judith
Nous sommes sur une île. Je vois Philipe venir, de loin. Philippe disparaît dans un escalier qui rejoint la rivière. Je lui dis, alors qu'il remonte — il m’a remarquée, je ne lui ai pas fait peur — une phrase folle. Il me regarde les yeux brillants, je lui dis, “ je suis au spectacle ”, de lui, de ce qu'il fait.
Qui le premier va vers la pointe de l'île ? Qui le premier attend l'autre ? Il y va, je le rejoins. Nous nous retrouvons face à face, devant l'étalement du paysage tout entier qui fait des bosses et qui vibre.
Nous nous essayons à une sorte d'amour tout engoncés de nos vêtements — c’est février — et, je ne sais pas pour lui, mais moi je jouis de lui, je suis attachée de plaisir. Il a le corps barré de la lanière de son sac, il porte un anorak, il a les cheveux courts, la peau tannée, une queue douce et longue.
Je prends sa nuque. Ma paume dans la courbure de sa nuque. Je sais que mes mains lui font plaisir, à le voir fermer les yeux, entrouvrir la bouche. C'est peut-être de l'usage qu'il fait des siennes. Cette manière qu'il a de remuer ma poitrine, de ce geste de va et vient-je-t-aime-viens me vient un plaisir fusant dont je ne sais rien et que je lui redemande.
Pour cela je lui en donne.
Il m'embrasse rarement, dans l'interstice étroit de ses lèvres, sa langue mouille précisément ce qu'elle touche. S'il m'embrasse, je reconnais à cette humidité la place de ma joie. Je passe mes bras sous ses hanches. Je dévale. J'embrasse la plissure du nombril. Donne à mes narines sa queue. Il se retourne dans le cercle fermé de mes bras. J’embrasse le vallonnement de ses fesses, la travée de son dos, je reviens à sa nuque sur laquelle j'écris en salive des promesses.
Ma main posée sur son front. Il y a là, sous ma paume, une voile de parfum qui claque, et me ravit, m'emporte. Il lèche, encore, comme pour simplifier l’impression de fête que je lui promets et qu'il lui tarde de connaître. Il passe mes doigts dans sa bouche, reprend dans un mouvement de salive jusqu'à s’enfoncer mon coude dans le gosier. Je brûle des bras.
La rambarde métallique noire, veinée de rainures bleues. Un vent limoneux chargé de pisse, de relent mou de vase accompagne le mouvement de sa main. Il frotte son gland dans le creux de sa paume. Il me regarde, au cas où, pour voir. Il relève ma veste, fourrage ma poitrine, écarte mon bras pour se caler à l'omoplate. Il m'attire, se cogne glisse entre mes jambes, entre mes cuisses. Il ouvre la bouche. Je le tiens en bas des reins, au bassin.
 
Christophe
Le ha-ha est un dispositif utilisé par les paysagistes du XVIIIe siècle anglais qui intègre le jardin au monde, et par là, à la vie économique. C’est un lien. Une liaison végétale.
Concrètement, c’est un fossé invisible depuis un point de vue qui relie le clos privé de la propriété à la campagne au second plan. Cet artifice pense la fusion du paysage avec une nature vierge et remplace les barrières et les haies. “ Il franchit la clôture et vit que toute la nature est jardin ”.
Ha-ha
HA ! HA ! ​​​​​​​
Ce fossé est une image de l’intervalle qui me tranche.
A l’échelle du jardin, cette rigole humide, ce saut-de-loup remplace la barrière sans que le regard aperçoive de limite à la vue. J’y trouve une entaille dilatée, une fente qui ne cesse de me dire la distance d’entre les deux bords. Et chaque lèvre immense de cette brèche entrouverte sur un fil indique ce qui me manque. Ce qu’est mon manque.
Cette lippe, à deux coutures ouvertes, me dit le lointain, le révolu, le disparu paysage, sentiment, corps. Et le proche, le désormais, l’actuellement. Cela, au moyen d’un ha-ha qui se contracte, s’élargit, se resserre ; inventé à Roubaix.
 
Donata
Je te vois avancer, de là où je t’attends, je sais que tu arrives. J’ai laissé derrière moi le jour conclu, les travaux bruyants, la hargne combattante des hommes et des femmes autour de moi qui crient, une eau pleine et usée dévale la rue étroite, les portes se ferment, une odeur de soupe jaillit dessous le porche, je traverse la ville, me voilà sur la mer, le vent bourdonne une rumeur, l’annonce du rivage baigné de ta présence concrète.
 
Vincent
Ce soir, le ciel ennuagé que touche un soleil caché fait des plaques de rose et d'orange. L’air est rattrapé d’obscurité bleue. J'en­gouffre dans le gouffre fendu de mon affection l’arrivée de ton corps ineffable sans voix, si seulement je pouvais l’étreindre, ce chant qui me tourmente, me prendre dedans, m’emmêler et comprendre ce qui me déplace vers toi et que je ne sais pas dire. En dessous de mon manque infini qui me fait dire et dire encore mon manque infini, crépite ce que j'attends du monde.
 
Donata
J'espère en toi. J'ai un souvenir de joie. J'ai entr’aperçu le bonheur dans tes bras, une caresse si juste que j’en attends retour.
 
Vincent
Que ne suis-je apaisé, endormi, coi, plutôt que la flambée de cette masse et de ce ventre et des chairs tout autour de cette charpente fumante qui trépigne et danse au cri que je fais, seul, je suis SEUL comptable de cette contredanse, sarabande ardente, de ma fièvre d’emportement, d’allure et de coups !
 
Donata
Tu es beau, noir-bleu d’une inquiétude qui te voile doucement. Entre dans mes bras, viens voir et toucher, aimer ce que je te jure, qui est une eau où je te baigne et bois et consomme et renoue, meurs suspendu au bloc consumé de mes bras qui t’enserrent, te retiennent et te bercent.
 
Vincent
Si je pouvais parfumer ce que tu touches et que le vent me rapporte les bouquets refait de ce contact. Je mettrais un lupin rouge brique sur la poignée de ta porte, une campanule sur ton peigne, éventuellement un pavot dans le creux de ton coude et que cela se froisse et pleure et se mélange au goût de ta peau. Mon arôme.
 
Donata
Je prends un chemin vers la crique qui ressemble à ce désir de syn­cope que j’ai, vers la mer. C'est la nuit et la clarté du soir donne à voir des formes immenses de roches compactes qui s'épaississent et remuent. Je suis près de toi sur la grève, tu m'as pris la main et baisé les doigts, ma paume à ton cou qui se plie, qui se donne à la ca­resse et à mon souhait, être avec toi, résoudre l'attention, donner à cet amour une forme dans le silence et la joie. Nous ren­trons dans les bras l'un de l'autre, à chacun. Ton odeur, premier signe doux, le mot sucré. Mon amour.
 
Eva
Cet amour à tel point me tenaille
Que quand vers elle je m’élance en courant
Il me semble qu’à rebours
Je vais et qu’elle me fuit
Et mon cheval est si lent
Que jamais je ne l’atteindrai
Si l’amour ne me la met en demeure.
 
Judith
L'avoir quitté un soir d'été. Alors qu'il monte dans sa voiture. N'avoir rien d'autre à vivre qu'un de ces souvenirs blanc lumineux d'un mou­vement irréfléchi, cette nuit. Le bras se lève de cette manière de dire au revoir, le visage tourné vers moi. À moi, d'imaginer maintenant le glissement qui l'emporte. À moi, cette multitude éblouie de mer­veilles qui me surprennent de les avoir vécues dans l'ignorance avec lui, grâce à lui, éloignées maintenant, brûlantes, attachées à son corps et perdues de distance dans la nuit, mais retrouvées, bril­lantes dans l'aller anodin du souvenir. Désormais, histoire close. Rien ne me reste que l'envie de le voir. Rêver de lui, le remettre de nuit à sa place dans ma vie. Et rien d'autre que moi, seule à jamais, puisqu'il est parti. Vivre avec lui. Toujours. Vivre avec lui pour supporter cet instant d’impénétrable obscurité.
 
Sylvain
Amor de tera lonhdana,
Per vos totz lo cors mi dol ;
E no·n puesc trobar mezina
Si non au vostre reclam
Ab atraich d’amor doussana
Dinz vergier o sotz cortina
Ab dezirada compahna.
 
Donata
Dors sur mon corps, moitié d’orange, merveille, mon fracas. Comme nous nous sommes dissociés dans l’instant de notre invention, dans le serré de nos deux corps voisins, dans la fonte vive de la distance entre nous qui est un abîme maintenant, cette béance, encore, est à franchir, à nouveau par moi boucher la fente. Reviens, essaye par-delà courants et souffles de joindre ce que j’annonce, ce que je te destine, ce que je ne cesse de te dire, “ c’est possible ”.
 
Eva
Jamais je ne m’endormis
si doucement que mon esprit ne fut vite là-bas,
ni jamais je n’éprouvais ici tant de tristesse
que mon cœur aussitôt n’y fût :
et quand je me réveille, au matin
toute cette douceur m’échappe, a, a.
 
Je sais bien que jamais d’elle je n’ai joui,
que jamais de moi elle ne jouira,
ni ne me tiendra pour son ami,
ni ne me fera, à son propre sujet,
aucune promesse;
jamais elle ne me dit ni vérité ni mensonge
et je ne sais si jamais elle le fera, a, a.
 
Fred
Salut !
Pardon.
Vous êtes chez moi.
Reste. Mon grand-père a construit ce tunnel, je t'invite.
Tu te tiens debout sur ma base secrète de sous-marins atomiques.
Je n'ai pas fait de châteaux depuis très longtemps, je ne suis pas venu depuis longtemps, ce n'est pas l'été, je viens d'arriver, c'est ma crique.
La mer, la mer toujours recommencée !
Venez.
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