Écrit qui a pour objet l'histoire d'une vie particulière.
30 Septembre 2005 
Arnold Pasquier
Familier du mélange des genres, le travail d'Arnold Pasquier s’établit dans la rencontre et le croisement des disciplines. Documentaires et fictions, danse contemporaine et installations multimédias, radio ; les formes sont expérimentées au profit d’une œuvre dont chaque pièce constitue la partie d’une recherche sensible où l’être humain est accompagné avec attention et sentiment.
Cinéphilie
Mon rapport à l’art est au départ un rapport au cinéma. Petit garçon, les films de Charles Chaplin m’ont persuadé de faire du cinéma, la rétrospective présentée à la mort de l’artiste m’a soudain ouvert un monde de fiction, ou le geste burlesque s’accompagnait d’une intense émotion communicative, puis ceux de Marcel Carné, de Josef von Sternberg, de Erich von Stroheim ont profondément marqué mon passage à l’adolescence qui était cinéphile. J’allais au cinéma plusieurs fois par semaines. J’ai eu des responsabilités variées — projectionniste, animateur, et même directeur d’une salle d’art et d’essai jusqu’à la destruction de notre salle du Palace, à Brunoy, en Essonne, par la promotion immobilière. La rencontre de l’art contemporain dans mon cursus scolaire, de la peinture, de la vidéo ont mêlé mon rapport au cinéma classique alors que je me rapprochais de formes plus expérimentales. Mais le récit cinématographique demeure. Il avance, discret mais présent, dans mes essais vidéo, et réapparaît régulièrement sous la forme de scénarios qui confirment mon goût pour le récit.

Art vidéo
Étudiant en cinéma audiovisuel à la faculté de Paris 1 Sorbonne – Saint Charles, l’enseignement des pratiques liées à la vidéo me paraît beaucoup plus stimulant, inventif et riche d’invention et de possibilités de réflexion. Avec Anne-Marie Duguet, Paul Devautour et d’autres professeurs, j’ai eu accès aux domaines de l’art vidéo, de l’installation et aux débuts de l’image calculée. Cette découverte, accompagnée du développement des moyens de tournage léger (apparition de la vidéo 8) m’ont fait entrer dans un mode d’expression qui influença dès lors mon travail. J’ai cadré presque tous mes films, du fait de cette production autonome mais aussi par goût. Je suis également chef opérateur pour des projets tournés en vidéo, dont le plus récent est le film de fiction  

Danse contemporaine
Alors que j’avais trouvé dans la littérature et dans les films l’origine de ce «monde qui s’accorde à nos désirs », le spectacle chorégraphique m’a apporté une vision singulièrement incarnée du corps. Mais la danse, irréductible à mon seul plaisir, réalisait un projet autonome qui m’obligeait à l’éveil. Je suis attentif aux gestes, à la fabrication, à l’expérience par le contact. Je m’intéresse aux espaces où les corps des hommes et des femmes sont conscients les uns des autres. Mon travail accompagne les visages et les corps. Le cadre et la scénographie dans laquelle ils évoluent sont révélateurs de trajectoires, de déplacements. La ville traversée est une scène active, les lieux sont la raison des actions qui s’y déroulent, ils participent du jeu en raison de leur qualité scénographique. Et si pour interpréter mes personnages je fais souvent appel à des danseurs, je sais qu’ils ont l’habitude d’entendre ce que je ne sais pas dire et que je tente de construire à l’aide de leur corps dans le cadre du plan.

Ateliers radiophoniques
Mon parcours me conduit vers le domaine radiophonique par le travail des bandes sons de mes films. Notamment au  FRESNOY, Studio national des arts contemporain ; les moyens dont nous disposons me permettent d’envisager ce qui m’apparaissait comme négligé dans mon travail. Grand amateur de radio, c’est en proposant des essais et des documentaires que j’ai rejoint l’équipe de producteurs délégués de  l'Atelier de Création Radiophonique de France Culture , ou je réalise des pièces qui sont pour moi des façons de poser des questions auxquelles je tente de répondre : peut-on faire entendre de la danse à la radio ? Comment exprimer un sentiment amoureux par le son?

Mise en scène
Mon intérêt pour le cinéma était lié au plaisir et au désir de jouer la comédie. J’ai étudié le théâtre quelques années au Cours Simon, puis je me suis intéressé à la danse contemporaine, et j’ai été interprète dans plusieurs spectacles de danse. Pendant mes années de lycées, j’ai expérimenté des essais de mise en scène en travaillant sur des défilés spectacles pour lesquels je créais des costumes ( Arnold 1•2•3). Cet intérêt s’est poursuivi au sein de projets pour lesquels j’ai conçu des scénographies, principalement à base d’images projetées et des mises en scène de  spectacles lyriques.

Interdisciplinarité
À la fin des années 80, j’ai été interdisciplinaire sans le savoir, bien qu’un peu isolé. Jeune artiste, j’éprouvais des difficultés à produire un travail qui alliait récit, danse et documentaire. C’est ce qui a initié une série de projet auto-produit, réalisé en vidéo. L’ouverture du FRESNOY, Studio national des arts contemporain en 1997 à été pour moi une révélation et une chance. J’y trouvais enfin le lieu qui proposait dans son programme pédagogique le mélange, « l’impureté », selon les propres termes du directeur Alain Fleischer. C’est là que j’ai pu trouver l’élan me permettant d’expérimenter des projets comme une installation-promenade ou le spectateur passait d’une installation vidéo à une installation photos, puis d’une projection de diapositive sur le toit accompagnée d’une bande son à un film de cinéma dans une salle.  C'est ici que je donne des baisers était une forme de synthèse de mes désirs de réalisations et la réserve de mon travail à venir. L’année suivante, je présentais dans la grande nef du Fresnoy le spectacle  C’est Merveilleux ou sur un texte écrit pour dix danseurs et acteurs, nous avons travaillé sur le thème de l’Amour de Loin, forme poétique d’amour courtois apparu au XIIe siècle en Occitanie .
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