
[English below]
En 2008, je propose à l’Atelier de Création Radiophonique de France Culture la réalisation d’un documentaire sur la transmission du rôle d’Orphée par Dominique Mercy à Yann Bridard, premier danseur de l’opéra de Paris, pour une tournée en Grèce du spectacle Orphée et Eurydice de Pina Bausch. J’y vois l’opportunité de m’approcher de la danse sans la « machine cinéma » et je convaincs Brigitte Lefevre, alors directrice de la danse à l’Opéra d’enregistrer les répétitions. En quelques séances, accompagné des techniciens de Radio France, j’assiste au travail d’apprentissage, à Garnier puis à Bastille. Le ballet est présenté au théâtre d’Épidaure le 19 juillet 2008. L’après-midi de la générale, je suis assis sur les marches du théâtre antique où j’assiste aux répétitions et je fais signe à Nicolaï Johnson qui m’accompagne, et qui photographie les nuages et les cyprès, pour qu’il fixe ce moment où Pina Bausch me rejoint.
Théâtre d'Épidaure, Grèce, 18 juillet 2008. Photographie de Nicolaï Johnson.
In 2008, I proposed to France Culture’s Atelier de Création Radiophonique the production of a documentary on the transmission of the role of Orpheus from Dominique Mercy to Yann Bridard, a premier dancer of the Paris Opera, for a tour in Greece of Orpheus and Eurydice by Pina Bausch. I saw this as an opportunity to approach dance without the “cinema machine” and convinced Brigitte Lefevre, then director of dance at the Opera, to allow the rehearsals to be recorded. Over a few sessions, accompanied by Radio France technicians, I observed the learning process, first at Garnier, then at Bastille. The ballet was performed at the Epidaurus Theatre on July 19, 2008.
On the afternoon of the dress rehearsal, I was sitting on the steps of the ancient theater, watching the rehearsals, when I gestured to Nicolaï Johnson, who was photographing the clouds and the cypresses, to capture this moment as Pina Bausch joined me.
Epidaurus Theatre, Greece, July 18, 2008. Photograph by Nicolaï Johnson.
« Revoir une image », c’est parier sur un retour vers une photographie issue de mes archives, réalisée par moi-même ou un membre de ma famille, ou un.e ami.e. À chaque image, j’adjoins un commentaire, une légende aussi factuelle que possible, pour faire émerger, du souvenir, la présence d’un instant suspendu à l’oubli.
Le geste de « revoir une image » devient ici une tentative de réactiver la mémoire enfouie, non pas en la forçant, mais en la laissant émerger à travers une description. Cette démarche invite à interroger le rapport entre l’image, l’oubli, et le souvenir : que reste-t-il d’un instant photographié lorsque les émotions qui lui étaient liées s’estompent ? En adjoignant une légende factuelle, je propose un « lieu » qui permet à l’image de « parler » par elle-même, libérant une interprétation plus universelle. Cet « instant suspendu » devient alors un point de rencontre entre un regard passé et présent, mais aussi entre l’intime et le collectif.